
Illustration du président des États-Unis Donald Trump et le drapeau américain
par David Shepardson
Donald Trump a annoncé jeudi un éventail de nouvelles taxes punitives, déclarant que les Etats-Unis allaient mettre en place dès la semaine prochaine des droits de douane de 100% sur les médicaments brevetés importés, de 25% sur les poids-lourds et de 50% sur les armoires de cuisine et lavabos.
Des droits de douane de 30% vont par ailleurs être prélevés sur les meubles tapissés importés dans le pays, a déclaré le président américain via son réseau Truth Social, précisant que toutes ces mesures entreraient en vigueur le 1er octobre.
Cette dernière salve de surtaxes, qui selon le locataire de la Maison blanche vise à lutter contre "l'inondation à grande échelle" de ces produits sur le territoire américain en provenance d'autres pays, fait suite à une série de droits de douane déjà annoncés pouvant atteindre 50% contre les partenaires commerciaux des États-Unis et à d'autres taxes spécifiques sur les produits importés, tels que l'acier.
L'avalanche de nouveaux droits de douane pourrait toutefois assombrir la croissance mondiale et compliquer la prise de décision des entreprises à travers le monde, tout en contribuant à la hausse des prix à la consommation aux États-Unis redoutée par la Réserve fédérale (Fed).
Les droits de douane de 100% sur les produits pharmaceutiques brevetés ou de marque s'appliqueront sur l'ensemble des importations, sauf si l'entreprise les distribuant commence à construire une usine aux Etats-Unis, a indiqué le chef de la Maison blanche.
Donald Trump a également déclaré jeudi que les taxes douanières sur les poids-lourds étaient destinées à protéger les producteurs américains de "la concurrence externe déloyale", estimant que la mesure sera profitable à des entreprises comme Peterbilt and Kenworth, propriété de Paccar, et Freightliner, détenu par Daimler Truck.
Revenu au pouvoir en janvier dernier, le républicain a entrepris une refonte de la politique commerciale de Washington, mettant en place nombre de droits de douane justifiés par son administration par des enquêtes de sécurité nationale et utilisés comme des outils de politique étrangère.
L'administration Trump a vanté ces derniers mois les importantes recettes récoltées par le Trésor américain grâce aux nouveaux droits de douane, visant des dizaines de partenaires commerciaux et des rivaux des Etats-Unis.
PLAFOND DE 15%
Les dernières annonces de Donald Trump sur Truth Social ne précisent toutefois pas si les nouvelles surtaxes s'ajouteront aux droits de douane déjà existants.
Les accords commerciaux bilatéraux conclus avec le Japon, l'Union européenne et la Grande-Bretagne prévoient des plafonds pour le pourcentage de taxation de certains secteurs, ce qui laisse supposer que les nouveaux droits de douane ne dépasseront pas les seuils convenus.
Dans le cas européen, un accord commercial préliminaire non contraignant entre l'UE et les États-Unis a limité les droits de douane à 15%. Donald Trump n'a toutefois pas encore signé de décret validant l'accord.
Selon la Commission européenne, ce plafond convenu avec Washington devrait agir comme une police d'assurance pour les entreprises européennes.
"Les États-Unis ont l'intention de veiller rapidement à ce que le taux tarifaire (...) appliqué aux marchandises originaires de l'Union européenne soumises aux mesures prévues à l'article 232 sur les produits pharmaceutiques, les semi-conducteurs et le bois ne dépasse pas 15%", a déclaré un porte-parole de l'exécutif européen dans un communiqué.
Le ministre irlandais du Commerce, Simon Harris, a également assuré que ce plafond restait en vigueur.
"Je tiens à souligner que la déclaration commune de l'UE et des États-Unis publiée le 21 août indiquait clairement que tout nouveau droit de douane annoncé par les États-Unis sur les produits pharmaceutiques serait plafonné à 15% pour les produits pharmaceutiques exportés par l'UE", a-t-il dit dans un communiqué.
En Irlande, les laboratoires pharmaceutiques, principalement américains, emploient environ 2% de la main-d'oeuvre.
Le Japon a pour sa part déclaré analyser encore l'impact potentiel des nouvelles mesures, faisant également référence à son accord avec Washington, qui stipule que les droits de douane américains sur les semi-conducteurs et les produits pharmaceutiques japonais ne dépasseront pas ceux appliqués à d'autres partenaires tels que l'UE
Canberra a pour sa part qualifiées les nouvelles surtaxes d'"injustes" et d'"injustifiées".
"UNE NOUVELLE GIFLE"
De nombreux fabricants mondiaux de médicaments ont par ailleurs annoncé cette année des plans d'investissement de plusieurs milliards de dollars aux États-Unis afin d'atténuer l'impact des menaces de droits de douane, parmi eux AstraZeneca, Roche, Novartis et Sanofi.
"(Les entreprises) continuent d'annoncer des centaines de milliards de dollars de nouveaux investissements aux États-Unis. Les droits de douane mettent ces projets en péril", a réagi l'association industrielle Pharmaceutical Research and Manufacturers of America.
En Allemagne, l'association de l'industrie chimique et pharmaceutique VCI s'est dit vendredi "profondément préoccupée" par l'annonce du président américain Donald Trump.
"C'est une nouvelle gifle. Et un nouveau coup dur pour les relations commerciales avec les États-Unis", a déclaré son directeur exécutif, Wolfgang Grosse Entrup.
Selon les données de l'Onu Comtrade, environ 60% des importations pharmaceutiques américaines en 2024 provenaient de l'Union européenne (UE). La Suisse, qui n'est pas membre du bloc, était le deuxième exportateur avec 9%.
En Europe, les fabricants de médicaments suisses Lonza, Novartis évoluent en légère hausse jeudi vers 08h51 GMT malgré les annonces, tandis que Roche, Merck, Bayer et Sanofi sont en légère baisse.
Les fabricants de poids-lourds Daimler Truck et Traton abandonnent 3,5% et 2,2%. L'action Volvo est en revanche en hausse de 2,8%, toutes les usines nord-américaines de l'entreprise suédoise étant situées aux États-Unis, tandis que Daimler Truck pourrait subir l'impact le plus important en raison de sa présence significative au Mexique.
Sur les marchés asiatiques, les entreprises pharmaceutiques plus exposées au marché américain ont été particulièrement touchées, telles que la Japonaise Sumitomo Pharma, qui a perdu 3,5% jeudi.
Lorraine Tan, responsable des actions pour l'Asie chez Morningstar, souligne toutefois que taux douanier final devrait être inférieur compte tenu du déroulement des négociations jusqu'à présent, mais que l'incertitude à court terme pourrait peser sur les cours des actions.
D'autres analystes s'attendent à un impact limité sur les fabricants de médicaments asiatiques, car beaucoup se concentrent sur les médicaments génériques.
(Reportage Ismail Shakil, David Shepardson et David Lawder à Washington ; Rocky Swift et Kantaro Komiya à Tokyo ; Khanh Vu et Francesco Guarascio à Hanoï ; Philip Blenkinsop à Bruxelles ; Julia Payne à Londres, rédigé par David Shephardson, John Geddie et Charlie Devereux ; version française Jean Terzian et Diana Mandia; édité par Augustin Turpin)
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